Pourquoi devrions nous nous libérer un peu de Google et autres GAFAM ?
Le sigle signifie Google – Apple– Facebook – Amazon – Microsoft. Ces grandes compagnies se partagent aujourd’hui notre budget numérique et notre « temps de cerveau ».
Ce qui pose aujourd’hui de sérieux problèmes aux citoyens comme aux Etats.—
Ils ont, en effet, tellement grossis et tellement pris d’importance dans nos vies qu’ils sont quasiment en situation de monopole. Le congrès américain s’en émeut. Il ne veut pas « se mettre à genou devant les tenants de l’économie numérique » et compare les Bigtech (autres nom données aux firmes dominantes de l’économie émergente) aux magnats du pétrole ou aux barons des chemins de fer du début du XXème siècle, dont les monopoles – trust en anglais – ont été démantelés….
GAFAM : qui possède quoi ?
- Google = moteur de recherche, navigateur internet Chrome, système d’exploitation de smartphone Android, boutique en ligne d’applications Play store, suite d’application (mail, calendrier, stockage distant, formulaires…), système de guidage Google maps relié à l’annuaire professionnel Google business, système de guidage Waze, système d’assistant vocal Alexa, plateforme d’hébergement vidéo Youtube, voiture connectée autonome Google car…
- Facebook = réseau social, réseau de partage photo Instagram, messageries Messenger et WhatsApp, système de réalité virtuelle Oculus VR… Au fait, Meta est le nouveau nom du groupe depuis octobre 2021...
- Apple = ordinateurs, système d’exploitation pour ordinateurs et smartphones, navigateur internet Safari, gadgets connectées, boutique en ligne d’applications Apple store, services de streaming Apple TV et Apple music, stockage distant Icloud…
- Amazon = plateforme de vente en ligne, services de streaming Amazon prime video et Amazon prime music, liseuse Kindle et son catalogue de livre numériques, application de livres lus (avec bibliothèque) Audible, autoédition de livres numériques Kindle Direct Publishing, stockage et services distants Amazon Web Services…
- Microsoft : logiciels et systèmes d’exploitation pour ordinateurs (part de marché au niveau mondial = 90 %) et smartphones, boutique en ligne d’applications Microsoft store, navigateurs internet Edge et Internet Explorer, application d’appels téléphoniques et vidéo Skype, moteur de recherche Bing, réseau social LinkedIn, messagerie électronique Outlook.com, consoles de jeu vidéo Xbox, tablettes Surface…
Le contour de ces entreprises évolue constamment. Les géants sont en effet à l’affut du rachat de leurs compétiteurs et friands de diversification… L’iconographie ci-dessus réalisée par l’association La boussole montre que leur poids économique respectif est équivalent, en ordre de grandeur, à celui d’un pays européen !
À noter que la notion de capitalisation boursière représente la valeur théorique à payer en Bourse pour acquérir l’entreprise. C’est un indicateur – versatile – de la confiance des investisseurs dans les profits à venir de ces sociétés.
Bon, donc, ils sont puissants – financièrement – et omniprésents dans nos vies.
Mais est-ce un problème ? Oui !
Pourquoi les GAFAM posent-ils un problème ?
Les GAFAM ont acquis un réel pouvoir « politique »
Leurs actions de lobbying pour faire évoluer la législation des états utilisent des moyens financiers peu communs. Ils influencent aussi directement sur nos pensées par leurs campagnes publicitaires ou encore les propositions des moteurs de recherche. Enfin, ils orientent nos comportements (achats, mode d’information ou de formation…).
Bref, ils sont devenus des entités quasi politiques, équivalentes là aussi aux états. Ils construisent désormais nos modes de vie et influent sur l’évolution de la société : ubérisation*, pratiques de sociabilité et d’informations via les réseaux sociaux…
Ubérisation (inspiré par la définition du formidable Toupictionnaire) Mot composé à partir du nom de l'entreprise américaine Uber, qui développe et exploite des plateformes mettant en relation des chauffeurs pour des services de transport avec des usagers via leurs téléphones mobiles. […] Désigne un nouveau modèle de commerce qui tire parti des nouvelles technologies numériques […] en mettant en relation directe et quasi instantanée des clients et des prestataires fournisseurs de ressources, avec un cout de revient réduit et des prix très bas. Ce nouveau modèle déstabilise le modèle économique classique (notamment certaines professions soumises à des règles strictes, comme les taxis), transforme les relations de travail (plus de contrat de travail par exemple, le livreur de repas Deliveroo est un « freelance »), et fait évoluer des pans entiers de la société (la plateforme de location de logements Airbnb bouleverse autant le secteur de l’hôtellerie que le marché des locations) ; il rend un grand nombre de législations (travail, commerce…) inadaptées.
Les GAFAM ont une éthique douteuse
Nos actions sur le web sont espionnées. Ils se servent de nos données à des fins d’exploitation commerciale ou de ciblage publicitaire. Ils en savent plus sur nous et notre vie privée que les services d’espionnage gouvernementaux !
Est-ce vraiment normal, innocent ?
Lorsque ces données sont mal protégées, des acteurs mal intentionnés peuvent par ailleurs s’en emparer : surveillance, vols d’identité, extorsion…
Les GAFAM n’hésitent pas non plus, avec leur pouvoir économique démesuré, à acquérir ou faire disparaitre d’éventuels concurrents en devenir.
Leurs intérêts sont de court-terme alors qu’ils impactent notre environnement et nos comportements : to big to care disent les américains (trop gros pour se soucier des impacts de leur influence)…
Les GAFAM créent une dépendance à leurs services monopolistiques
Leurs services sont de telle qualité que l’homo-numéricus (= homme ou femme de l’ère numérique qui passe son temps sur un ordinateur / tablette / smartphone) est accro.
Ils nous rendent captifs de systèmes centralisés et marchands (directement ou indirectement) sans que nous puissions facilement réagir. Leur accessibilité est leur grande force, tandis que se passer d’eux demande de beaucoup d’énergie et de compétences numériques…
Des colosses fragiles
La prise de conscience grandissante de cette toxicité et le développement de contre-modèles plus vertueux peuvent toutefois fragiliser les GAFAM, dont la « réputation » est de plus en plus entachée par leurs agissements. Ils irritent de plus en plus de gouvernements (Europe, États-Unis…), des collectifs de citoyens ou des professionnels du numérique.xx
Dans le numérique tout change très vite et on peut se désintéresser ou se libérer d’un service aussi vite qu’on s’y était attaché.
Pendant des années, j’organisais mes trajets en voiture avec Mappy, puis avec Google Maps, et maintenant avec Waze, demain avec framacarte….
Se libérer de Google & co en testant des alternatives
Puisqu’on parle de framacarte, jetons un coup d’œil au projet de framasoft, association française qui s’est donné comme objectif de proposer une trentaine de services libres alternatifs « face aux services qui aspirent nos données et nous enferment ». Ce sont eux qui ont lancé la campagne « Dégooglisons Internet ».xxx
Parmi les alternatives très pratiques qu’ils proposent :
- Framadate pour créer des sondages de dates (plutôt que doodle, qui n’appartient pas aux GAFAM, mais dont le modèle économique repose aussi sur la publicité) ;
- Framatalk pour rejoindre un « salon » de vidéoconférence (avec tchat et partage d’écran) ;
- Framaform pour des enquêtes en ligne efficaces et respectueuses des données ;
- etc.
L’association, qui fait le lien entre le « monde libre » (nous en parlerons dans un prochain article) et le public, a besoin de soutien : des utilisateurs, des contributeurs, des dons…
D’autres alternatives existent aussi en dehors des « frama ».
CBC-Radio Canada en a testé certaines dans cette courte vidéo (9 min) très drôle, que nous vous recommandons de visionner : Vivre sans Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft ?
De plus en plus de citoyens sont préoccupés par l’emprise des géants du web, les GAFAM, sur leur vie numérique. Pourrait-on fonctionner sans eux ? Pour le savoir, Alessandra a obligé Nicolas à passer une journée sans Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft. Pour les aider dans leur démarche, ils ont rencontré Antoine Beaupré, un informaticien et «hacker», qui tente d’éviter les GAFAM au quotidien.
Bref, pour vous libérer des GAFAM, essayez donc :
- Diaspora plutôt que Facebook
- Firefox ou Brave (environnement quasi identique à Chrome), comme navigateur internet
- duckduckgo , Lillo, Ecosia ou Quant comme moteur de recherche
- LibreOffice plutôt que les suites bureautiques de Microsoft ou de Google
- ProtonMail pour la messagerie
- Signal plutôt que WhatsApp ou Messenger
Testez donc ces applications et n’oubliez pas la phrase maitresse de La Boétie dans le Discours de la servitude volontaire : « Soyez donc résolus à ne plus servir et vous serez libres ».
N’hésitez pas à partager vos commentaires et alternatives personnelles…
Au plaisir de vous lire (et d’écrire pour vous).
Pascale & Christine
>>> pour approfondir
- Un génial lexique des termes du monde numérique, par un passionné de pédagogie
- Article des Echos sur les pratiques de lobbying des GAFAM
- Pourquoi Facebook a racheté Instagram, par Slate
- Un exemple de pratique déloyale de Google, par nextinpact.com, un autre dans 20minutes
Très bon article très instructif. Je vais explorer les alternatives
super article, je vais tout de suite aller voir les alternatives que tu as citées! Merci